Source: Pro Mente Sana- Lettre trimestrielle No. 82-83 ( déc.2020)
Le 19 novembre dernier, une motion pour rétablir les droits politiques des personnes sous curatelle de portée générale a été déposée dans le canton de Vaud par le député Hadrien Buclin. La motion est en partie basée sur l’article 29 de la CDPH. Pro Mente Sana salue l’initiative.
Titre de la motion
Mettre un terme aux
discriminations en matière de droits politiques contre les personnes atteintes
de troubles psychiques ou de déficience mentale
Texte déposé
Selon l’art. 3 de la
Loi vaudoise sur l’exercice des droits politiques (LEDP), les personnes faisant
l’objet d’une curatelle de portée générale pour cause de trouble psychique ou
de déficience mentale sont privées du droit de vote. Elles peuvent néanmoins
être intégrées ou réintégrées dans le corps électoral, par décision de la municipalité
de leur commune de domicile, en prouvant qu’elles sont capables de discernement.
Cette privation discriminatoire des droits politiques à l’égard des personnes souffrant d’un handicap psychique ou intellectuel est contraire à l’article 29 de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées du 13 décembre 2006, entrée en vigueur en Suisse le 15 mai 2014 (CDPH RS 0.109). Voici un extrait de cet article : « Les Etats Parties garantissent aux personnes handicapées la Jouissance des droits politiques et la possibilité de les exercer sur la base de l’égalité avec les autres, et s ‘engagent: a) à faire en sorte que les personnes handicapées puissent effectivement et pleinement participer à la vie politique et à lavie publique sur la base de l’égalité avec les autres, que ce soit directement ou par l’intermédiaire de représentants librement choisis, notamment qu’elles aient le droit et la possibilité de voter et d’etre élues […] » De plus, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé qu’une restriction absolue au droit de vote imposée à une personne sous tutelle sans tenir compte de ses facultés réelles n’est pas admissible (arrêt du 20 mai 2010 suite à la requête n° 38832/06).
L’art. 3 de la LEDP, qui exige que la personne privée de droits politiques fasse la preuve qu’elle est capable de discernement, paraît en outre contraire à l’art. 16 du Code civil qui prévoit la présomption de capacité de discernement. La jurisprudence fédérale (arrêt 5A_479/20l9 du 24 septembre 2019) considère comme erroné de prétendre que la curatelle de portée générale supposerait obligatoirement l’existence d’une incapacité de discernement.
A noter que des interventions en faveur du rétablissement des droits politiques pour les personnes atteintes de handicap psychique ou intellectuel ont été déposées ces dernières semaines dans plusieurs Parlements cantonaux (voir par exemple les PL 12211 et 12212 au Grand Conseil genevois). Les autorités fédérales devront par ailleurs répondre d’ici l’automne 2020 à une interpellation du Comité des droits des personnes handicapées de l’ONU qui concerne notamment les droits politiques des personnes handicapées.
La présente motion demande au Conseil d’Etat de soumettre au Grand Conseil une révision ou suppression de l’art. 3 de la LEDP, afin de rétablir les droits politiques pour les personnes faisant [‘objet d’une curatelle de portée générale.
Voir aussi:
» Extrait de l’arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause Ordre des Avocats Neuchâtelois, Jeune Barreau Neuchâtelois, A. et B. contre Conseil d’Etat et Grand Conseil de la République et canton de Neuchâtel (recours en matière de droit public) 5C_2/2017 du 11 mars 2019 «